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Channel: éducation – Le blog de Jean-François FIORINA
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« Nuit de Chine » : réflexions sur l’enseignement supérieur chinois

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Lors de ma revue de presse quotidienne, je suis tombé la semaine dernière sur une tribune : « Education, une nouvelle nuit de Chine » de Sabine Delaglande publiée dans les Echos. Ce bon article donne quelques clés de compréhension du système éducatif en Chine, notamment cette culture ancrée des concours, fruits d’une très longue tradition. À l’époque impériale, les concours pour les lettrés étaient le moyen de faire carrière. Ils sont aujourd’hui le moyen d’accéder à de (très) bonnes universités. 

La Chine est un pays qui nous fascine autant qu’il nous inquiète. Peut-être encore plus pour moi avec mes deux casquettes, celle de Directeur des Programmes d’une Grande Ecole de Management et celle de fan de géopolitique même si comme je le rappelais lors d’une récente conférence, les deux deviennent de plus en plus imbriqués… Que faut il en retenir ? 4 éléments de réflexion :

Un système d’enseignement supérieur de plus en plus performant

comme on peut le voir dans les différents classements internationaux dont celui de Shanghai. Il n’est pas inutile de rappeler que ce dernier a été créé pour montrer aux universités chinoises le chemin à parcourir pour jouer dans la cour des grands.

Dans notre monde des B-schools, nos homologues chinoises se sont lancées dans la course aux accréditations internationales. La Chine devance la France au nombre d’institutions accréditées EQUIS (25 contre 22). Seule l’Angleterre est en tête. Il en est de même pour AACSB.

Ces BS ont donc des niveaux de performances équivalentes et leurs moyens vont leur permettre de continuer à se développer. Qui sait si nos enfants ou petits-enfants préféreront peut-être aller étudier dans ces universités. D’autant que je pense qu’elles vont commencer à se déployer à l’étranger (sur le même modèle qu’un grand nombre d’industries) à moins que Xi-Jinping en décide autrement en favorisant le marché intérieur. Il va falloir surveiller cela de très près dans les semaines à venir car le monde universitaire n’est pas à l’abri de décisions similaires à celles qui ont été prises à l’encontre des géants groupes chinois de la tech.

Une interrogation sur l’avenir de la Edtech chinoise

à la suite aux décisions brutales prises par Pékin cet été notamment vis-à-vis des sociétés de soutien scolaire.

Comme toujours en Chine, les raisons sont multiples, combinant éléments de politiques interne et externe, économiques, voire même géopolitiques avec la crainte d’une perte de souveraineté sur les contenus. Reste que Pékin risque de disparaitre des radars de la Edtech mondiale. Je ne suis pas en mesure aujourd’hui d’en mesurer les conséquences immédiates mais il est certain que cela ouvre les portes aux Edtechs indiennes (pour rappel Biju’s est la Edtech qui a la plus forte valorisation dans le monde) ou américaines, voire aux GAFAM.

Une interférence avec la géopolitique

Tout d’abord avec les Chinois qui vont étudier à l’étranger.

Ils représentent une masse financière conséquente pour certains pays dont l’Australie mais aussi les USA où un grand nombre sont inscrits dans des programmes doctoraux. De tels effectifs représentent un élément de négociation — ou de pression ou de chantage, cela dépend comment on voit les choses ! — non négligeable. Les déclarations du ministre chinois de l’enseignement conseillant à ses compatriotes de ne pas aller étudier en Australie a jeté un froid au sein des universités de ce pays.

Ils peuvent aussi constituer une menace puisque l’on sait que certains de ses étudiants sont en fait de faux étudiants chargés de mission d’intelligence économique (c’est un euphémisme !). La plupart des nations occidentales en ont pris conscience et sont désormais très vigilantes sur leur accueil  comme le montre le refus par l’administration Biden de donner un visa à 500 étudiants au début de l’été.

Géopolitique aussi avec les instituts Confucius, objet de fortes controverses dans nombre de pays et qui ont conduit le Sénat à s’y intéresser dans le cadre d’une mission d’information sur les influences étatiques extra-européennes. La publication du rapport est prévue ces prochains jours.

Géopolitique enfin, avec la part croissante d’idéologie dans les contenus et la gestion des universités. Les futurs étudiants – y compris étrangers ! – devront-ils apprendre par cœur les citations « d’oncle Xi » et seront-ils évalués sur leurs connaissances de sa pensée ? On peut aussi inclure la surveillance des contenus qui seront enseignés, en opposition avec la liberté académique.

N’oublions pas que la Chine est également devenue une puissance scientifique et innovante

L’article publié par Le Monde du 29 septembre explique que cette réussite tient à une stratégie à long terme, patiemment tissée de coopérations et d’alliances tous azimuts. On n’oubliera pas qu’il y a eu aussi beaucoup d’intelligence économique mais quoi qu’il en soit le poids de la Chine dans la R&D mondiale va aller crescendo, sauf revirement politique (comme expliqué plus haut dans le texte). On ne peut l’ignorer et il faudra bien continuer à collaborer avec des universités et centres de recherche chinois, surtout s’il on a assiste un découplage technologique entre Washington et Pékin.

On ne peut pas donc faire l’impasse sur cette Chine et l’ignorer dans nos stratégies d’internationalisation. La question est la suivante : comment l’intégrer !?

 

À suivre !

 


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